
Editeur :
Cornélius
Collection
:
Solange
Date de publication : novembre 1998
ISBN : 2-915492-42-5
Prix : 18,29 €
Noir et blanc
CRUMB Robert, Scénariste/Illustrateur |
Quatorze histoires qui nous retracent le sentiment de nostalgie du
plus grand dessinateur underground américain.
Un receuil de dessins tiré des carnets de croquis de Crumb de 1967
à 1996.
Le pape de la bande dessinée underground américaine, du temps du
L.S.D. et du rock psychédélique ne serait en fait qu'un
indécrottable nostalgique n'écoutant que de la musique antérieure
aux années cinquante... Une révélation pour ceux qui avaient arrêté
de lire Crumb quand
Actuel (première formule) a cessé de
paraître...
Les autres, ceux qui comme moi l'ont redécouvert dans les pages de
l'Echo des Savanes ou du
Psikopat, savent que l'homme
n'a cessé depuis les années quatre-vingts de régler ses comptes
avec ses années soixante, la jeunesse, la pop music, etc.
Se mettant en scène en misanthrope râleur et de mauvaise foi,
sentant le besoin de s'expliquer longuement sur ses apparentes
contradictions, il profite de l'anthologie que lui consacre
Cornélius pour enfoncer le clou une fois pour toutes... Mister
Nostalgia, donc... La bande en une planche qui donne son titre au
recueil met en scène un collectionneur d'objets anciens,
visiblement frustré et totalement inadapté à son époque...
Autoportrait ironique à peine camouflé de l'auteur : si Crumb ne se
ménage pas, non plus que ses « collègues » collectionneurs
nostalgiques et sans scrupules, chacun en prends pour son grade :
les jeunes musiciens de rue, les jeunes qui dansent sur des
musiques de jeunes, les jeunes en général...
Et puis ses propres lecteurs, anciens hippies ou jeunes hippies qui
l'adulent pour une oeuvre qu'il a reniée : L'auteur met un point
d'honneur à dénigrer Keep on Truckin', la planche qui a peut-être
le plus contribué à le rendre célèbre... Crumb joue parfaitement
ici son rôle de vieux con...
Alors on pourrait penser que toute cette nostalgie et toute cette
mauvaise foi accoucheraient d'un album haineux et sans intérêt...
C'est mal connaître le personnage, son humour ravageur et son trait
incisif. Il faut dissiper le malentendu, encore tenace malgré la
reconnaissance. L'oeuvre de Robert Crumb n'échappe pas aux lieux
communs : misogynie, misanthropie... Il faut dire que l'auteur s'y
complait souvent. Mais il en joue toujours avec humour, avec une
immense tendresse et une intelligence qui font de lui, non
seulement le plus grand dessinateur underground des années soixante
mais un des plus grands auteurs contemporains.Ici, Robert Crumb se
pose en historien de l'Amérique, du blues, de la musique en
général, en partant des drames et des désillusions de l'homme, avec
comme point d'orgue ces planches magnifiques, datant de 1984,
consacrées au bluesman Charley Patton : une plongée dans le
Mississipi noir des années vingt. Des planches à l'atmosphère
étouffante, au trait d'une noirceur insondable, pourtant lumineuses
et terribles... Une tragédie en musique : grandeur et décadence,
rédemption, mort, et puis ces quelques vers lancinants, comme
épitaphe : oh, hush, oh, hush, somebody's calling me, Lord, I know,
Lord, I know my time ain't long...